Vous avez déjà fait des travaux ?
C’est une expérience qui s’apparente à un trekking de 3 mois au Népal alors qu’on n’a jamais marché plus de 3 heures dans les Vosges. Avec en ligne de mire, un endroit fantasmé, le toit du monde.
Au départ c’est l’excitation de l’aventure, on démarre sur les chapeaux de roues. On pète avec une joie mauvaise les murs qui enferment des pièces minus, les vieux plafonds trop bas, les vieux carrelages dégueulasses, et on se retrouve dans un espace nouveau, clair, dégagé, plein de promesses. On se dit que la première étape est cool finalement, mais quand on fait la pose, on est dans une ruine.
Après on commence à reconstruire, mais on se fatigue, la pente est raide, c’est long, trop long. On fait une overdose de béton, on a des nausées, ça y est, on rentre dans la vallée du désespoir.
Et puis soudain, la météo tourne, le guide presse le pas, vite, vite, il faut avancer. Ça se bouscule sur le chantier, on perce, on rebouche, on met partout des fils, des câbles, des tuyaux. C’est toujours la vallée du désespoir, mais en plus, il pleut, il fait froid. Il faut choisir en un éclair des trucs avec lesquels on va passer tout le reste de sa vie, les portes, les fenêtres, les prises électriques, les robinets, la hotte, la cuisinière, les radiateurs, le frigo, les luminaires, la couleur des murs, la couleur des portes, la couleurs des fenêtres, le matériau des sols, les lavabos, les wc, les boutons de chasse d’eau, les interrupteurs, les boutons des placards, et les poignées de portes. Et là, c’est le burn-out, on a le vertige, on se dit qu’on va mourir dans la seconde et dans d’atroces souffrances.
C’est à ce stade critique, en plein mois de janvier, que j’ai reçu le mail de Corinne Darmon.